Le retour en grâce de la newsletter

Aurélie Vathonne
Netsources no
138
publié en
2019.02
1383
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Newsdesk | livrables de veille
Le retour en grâce de la newsletter Image 1
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La newsletter, format quasi historique du web - si l’on fait exception des encore plus anciennes « listes de diffusion » qui avaient cours dans les années 90 - défie toutes les prédictions de sa disparition. On la pensait dépassée et oubliée au fond de nos messageries mais il semblerait qu’elle bénéficie d’un regain dans la plupart des medias.

Pour preuve, quelques initiatives récentes : l’apparition en 2018 d’une newsletter exclusive dédiée aux abonnés du Figaro (La Lettre du Figaro premium), ou bien la constitution d’une équipe interne spécifique pour « rénover » les newsletters du Wall Street Journal, ou encore la création d’une newsletter payante chez Presse Citron (site web dédié au digital et aux nouvelles technologies), proposant un contenu différenciant et à valeur ajoutée à travers sa newsletter Citronium.


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La newsletter d’aujourd’hui n’est plus seulement un « attrape-lecteur » destiné uniquement à augmenter le trafic d’un site. Elle se veut media à part entière, souvent dotée d’une ligne éditoriale, et cible une audience moins connectée, désireuse de prendre du recul et de mettre l’information en perspective. Pour les éditeurs de médias généralistes, la newsletter fait partie intégrante de la stratégie digitale, initiant une réorganisation du contenu par sujet très pointu ou par point de vue ; elle permet de s’affranchir des silos que sont les rubriques traditionnelles des éditions web et les incontournables algorithmes qui dominent sur les réseaux sociaux, pour proposer une éditorialisation alternative, ciblant des communautés d’intérêt ou de pratique. C’est ainsi que le Wall Street Journal a créé par exemple cet été la newsletter Unprepared qui s’adresse aux baby-boomers supposés moins bien préparés à la retraite que d’autres générations.

Côté lecteur, la valeur ajoutée de la newsletter se dessine donc aujourd’hui d’une part à travers un contenu ultra ciblé, et parfois par la mise à disposition d’un contenu exclusif par rapport au contenu web gratuit. Pour les éditeurs, les avantages de la newsletter « nouvelle génération » sont évidents : elle leur donne l’occasion d’établir un lien beaucoup plus engagé avec une communauté de lecteurs de surcroit identifiés par leur e-mail. Ce moyen de diffusion leur permet également d’aller chercher le lecteur là où il se trouve : dans sa boite mail, qui est nécessairement consultée plusieurs fois par jour.

C’est aussi probablement pour cette raison que, a contrario, les flux RSS qui ont connu leur apogée il y a une dizaine d’années, ont peu à peu disparu d’une grande majorité des sites de presse, tout du moins en apparence.

Comment identifier des newsletters d’intérêt ?

On renoncera à utiliser des moteurs de newsletters tels que Email Tuna : ces derniers sont exclusivement anglo-saxons, répertorie des newsletters très commerciales, et permettent une recherche par mots-clés dans les archives de newsletters. De plus, les résultats qu’ils renvoient ne sont pas des descriptions de newsletters correspondant à un sujet mais des éléments disparates contenus dans les newsletters.

La méthode la plus sûre est donc d’identifier d’abord les sources les plus pertinentes, puis de regarder pour chacune les possibilités de suivi qui sont proposées (newsletters, RSS, voire parfois réseaux sociaux tels que Twitter ou Facebook).

Et pour la veille : newsletter ou RSS ?

La réponse n’est pas toujours la même en fonction du site que l’on souhaite surveiller.

La première étape consiste donc d’abord à analyser le site web, et à comparer le contenu de ce qui est offert via la newsletter versus via le ou les flux RSS, quand ils existent.

Il est certain que le format RSS reste intéressant pour le veilleur puisque les lecteurs de flux comme Feedly ou Inoreader, permettent de regrouper et de filtrer sous ce format toutes les sources web d’intérêt que l’on souhaite surveiller. Mais le RSS n’est malheureusement pas toujours disponible, même de façon cachée ! Par ailleurs, certains sites ne proposent qu’un flux RSS général pour tout le site et non par rubrique ou par thème. Cela vaut alors le coup de regarder les possibilités offertes par la ou les newsletters.

Pour le RSS, on recherchera le bien connu logo orange ou tout simplement la mention « RSS » par un CTRL+F ; le plus efficace reste cependant d’utiliser un détecteur de flux tel que Want my RSS (pour Firefox) ou encore Extension Abonnement RSS (pour Chrome). Il est important de savoir que ces détecteurs fonctionnent très bien mais page par page et non pour un site global. Ainsi, pour vérifier si un flux RSS existe il faudra se positionner sur la rubrique ou la recherche précise ciblée, et non sur la page d’accueil du site web.

Les offres de newsletters sont en général beaucoup plus visibles que les flux RSS. On trouvera en général en haut ou en bas de la page web du média, un lien « Newsletter », assorti d’un bouton figurant une petite enveloppe.

Par exemple, le site de l’Argus de l’assurance n’offre pas de flux RSS, mais il propose 3 newsletters : « Tech », « Distributeurs » ou « Incontournables ». A l’inverse, l’offre du Monde est beaucoup plus riche en flux RSS (plusieurs dizaines de flux avec des angles très spécifiques tels que « Etudier à l’étranger ») que dans le format newsletter qui n’offre que 7 possibilités.

Suivre une newsletter ailleurs que dans sa boite mail « standard »

Mais se pose alors la question de l’outil de lecture. Pour le veilleur, la réception d’une newsletter dans sa boite mail courante n’est pas une solution satisfaisante car celle-ci va se retrouver noyée avec tous les autres messages reçus quotidiennement. De plus, le temps de consultation des messages e-mail ne se superpose pas nécessairement au temps de traitement des alertes de veille dans une journée de travail.

Si cette solution est quand même retenue, on veillera au moins à créer une règle de tri pour isoler automatiquement la/les newsletters reçues dans un ou plusieurs dossiers spécifiques de la messagerie.

Une autre solution évidente consiste à créer une adresse e-mail dédiée dans laquelle pourront également être reçues les alertes d’autres outils (serveurs de bases de données, crawlers etc.)

Enfin, une autre possibilité consiste à lire la newsletter dans un outil déjà couramment utilisé, que ce soit un lecteur de flux comme Inoreader ou un outil de web monitoring comme KB-Suite (KB Crawl).

Sur Inoreader, la fonctionnalité est nativement intégrée à l’outil. Ainsi, si l’on souhaite s’abonner à la newsletter « Tech » de l’Argus de l’assurance citée plus haut, voici la méthode à suivre :

  1. Créer un mot-clé qui va servir à « indexer » toutes les newsletters reçues et à les regrouper derrière un dossier du même nom :
  2. A partir de ce mot-clé, cliquer droit pour obtenir une adresse de courriel spécifique :
    S’abonner à la newsletter à partir de cette adresse e-mail.
  3. Tous les nouveaux messages, c’est-à-dire tous les nouveaux numéros de la newsletter, seront désormais envoyés directement dans Inoreader et pourront être récupérés derrière le dossier du mot-clé « Argus de l’assurance ».

On notera que dans ce cas, 1 item de Inoreader = 1 newsletter qui contient plusieurs infos, alors que dans le cas d’un flux RSS, chaque info correspond à 1 item de Inoreader.

Par ailleurs, dans l’un des billets du blog Outils Froids, Christophe Deschamps livre un tutoriel permettant de recevoir dans Inoreader, et converties au format RSS, les newsletters créées avec MailChimp qui est l’outil le plus couramment utilisé pour ce type d’envoi.

KB-Suite offre aussi la possibilité de lire une newsletter au sein de sa plateforme, et de la consulter avec les autres alertes de type « web ». Il faut pour cela créer une adresse e-mail spécifique puis configurer celle-ci dans le crawler KB-Crawl. Le paramétrage d’une source de type « e-mail » dans KB-Crawl est cependant beaucoup plus technique que dans Inoreader, puisqu’elle est similaire au paramétrage d’une adresse de messagerie dans Outlook.

Nous avons ici volontairement écarté des outils de lecture spécifiquement dédiés aux newsletters tels que Stoop. Cet outil est plutôt attractif a priori et permet une lecture très agréable de toutes ses newsletters sur mobile dans un même endroit. Néanmoins, cela augmente encore le nombre d’outils et d’autre part, l’exportation des informations à partir d’un mobile pour une exploitation ultérieure n’est pas forcément la plus pratique.

L’abonnement aux newsletters est donc à (re)considérer au sein d’un dispositif de veille, car son contenu peut être à la fois riche et surtout mieux ciblé pour une problématique donnée.

Pour chaque source identifiée comme per­tinente, on recommandera de comparer la structuration du contenu offerte par les rubriques du site / les flux RSS / les newsletters, afin de choisir ce qui correspond le mieux au thème de surveillance. Si la surveillance des deux premiers trouve « naturellement » son outil de surveillance (webcrawling pour les uns, lecteurs de flux pour les autres), le choix de la méthode de surveillance pour les newsletters (adresse e-mail dédiée, Inoreader ou outil de surveillance du web), devra s’effectuer en fonction du dispositif qui est le plus utilisé pour sa veille, afin de limiter la multiplication des outils à consulter.