Les lecteurs de flux RSS : une alliance entre simplicité et efficacité
Présents depuis les années 2000, les lecteurs de flux RSS sont avant tout des lecteurs/agrégateurs qui permettent de s’abonner à des flux RSS présents sur des sites web pour en suivre les nouveautés.
Le contexte actuel est en apparence peu propice pour ce type d’outils : de moins en moins de sites web proposent des flux RSS et les réseaux sociaux ont tous, les uns après les autres, interdit la récupération de flux RSS pour garder les internautes captifs sur leur plateforme. Et pourtant, les lecteurs de flux RSS n’ont pas pour autant disparu et ont même su se renouveler et s’améliorer.
Aujourd’hui, deux grands acteurs tirent leur épingle du jeu pour les veilleurs : Inoreader et Feedly qui fonctionnent tous deux sur un modèle freemium
Voir notre article « Quel lecteur de flux RSS choisir en 2020 ? » - BASES n°384 – septembre 2020 – envoi gratuit sur simple demande.
Au-delà de la simple lecture de flux, ces deux outils sont aujourd’hui devenus des outils de veille beaucoup plus complets et permettent également de surveiller des contenus qui n’entrent pas ou plus dans le giron du RSS (création de flux sur des pages qui n’en ont pas, surveillance des réseaux sociaux et notamment Twitter et Instagram, création d’alertes web, etc...).
Pour pouvoir pleinement utiliser Feedly et Inoreader pour la veille, il est quasi indispensable de souscrire à l’une des offres payantes. La version gratuite de chacun de ces outils est aujourd’hui extrêmement limitée.
La très grande majorité des autres lecteurs de flux RSS sur le marché s’en tiennent aujourd’hui à une utilisation classique de lecture/agrégation de flux RSS avec de temps en temps quelques fonctionnalités en plus qui égalent au mieux, mais ne surpassent jamais ni Inoreader ni Feedly. Certains ont encore l’avantage d’être complètement gratuits, mais c’est de plus en plus rare.
Notre avis :
Quand on souhaite s’orienter vers des outils de veille gratuits ou bon marché, le recours à un lecteur RSS est un passage quasi obligé. Ces outils ont l’immense avantage d’être performants tout en étant simples et intuitifs à utiliser.
Après l’étape de sourcing (sélection des sources pertinentes pour la veille), ces outils vont avant tout permettre de faire de la « veille ciblée » à partir de sources que l’on connaît déjà. Mais, on constate que quelques acteurs et notamment Inoreader et Feedly s’aventurent également de plus en plus sur la route de la « veille radar » en proposant la création d’alertes sur le Web, les réseaux sociaux ou encore les moteurs d’actualités.
Les outils de surveillance de pages : les plus anciens, mais toujours présents à l’appel
Les outils de surveillance de pages sont les ancêtres de la veille sur le Web à la fin des années 90. Tous les outils du marché se focalisaient alors sur cette fonctionnalité et même les grosses plateformes de veille payantes qui ont débuté à la même période (comme Digimind, KB Crawl, Keywatch, etc.).
Il existe encore aujourd’hui une multitude d’outils qui restent spécialisés uniquement sur la surveillance de pages. Certains datent des années 2000, mais on trouve également des outils plus récents qui ont réussi à renouveler le genre en le rendant plus attractif.
Ils fonctionnent pratiquement tous sur un modèle freemium avec une version gratuite très limitée quant aux nombres de pages que l’on peut surveiller.
Pour bien comprendre le marché des outils de surveillance de pages présents sur le marché aujourd’hui et disposer d’un benchmarking détaillé des différentes solutions, nous vous invitons à lire l’article « Veille : les outils de surveillance de pages gratuits et freemiums au banc d’essai » dans ce même numéro.
Notre avis :
Quel est encore l’intérêt des outils de surveillance de pages Web (ou web crawling) alors qu’il existe des lecteurs de flux RSS qui offrent une expérience similaire, mais bien plus ergonomique ?
C’est qu’il existe encore de nombreux cas de figure que les lecteurs de flux RSS ne couvrent pas, ou mal.
On pensera par exemple aux sites qui proposent un flux RSS sur l’ensemble du site, mais pas sur une rubrique précise, aux sites qui n’ont aucun flux RSS, aux cas où ce que l’on cherche à surveiller ne peut pas être « transformable en flux RSS » (changement de prix sur une page, détecter les modifications apportées sur un article ou sur une page, etc.).
Ces outils de web crawling représentent donc un complément utile aux lecteurs de flux RSS.
Ces outils vont principalement se focaliser sur la « veille ciblée » à partir de sources que l’on a soi-même choisies. Certains acteurs permettent néanmoins de mettre sous surveillance des requêtes dans des moteurs, ce qui permet de faire un peu de « veille radar » même si cela reste rare et ne fonctionne pas toujours bien.
Les outils d’alertes web : utiles mais si peu exhaustifs
Les outils d’alertes web sont également présents depuis de très nombreuses années avec son représentant le plus connu : Google Alertes.
Le principe est simple : à partir d’une requête ou d’un mot-clé, l’outil parcourt le Web ou du moins son propre corpus web à la recherche de nouveaux contenus correspondants aux critères. Il permet ensuite de recevoir ces nouveaux contenus par alertes mail ou par flux RSS. Ces outils répondent à la définition même de la « veille radar ».
Bien qu’ils soient très séduisants sur le papier, ils ont beaucoup de limites.
GOOGLE ALERTES
Google Alertes par exemple est loin d’être exhaustif et on risque très fortement de passer à côté de nombreux résultats pertinents en s’y limitant. Google Alertes a également un problème récurrent de spams depuis quelques années pour lequel Google ne semble rien faire.
Il faut dire que Google ne s’occupe plus vraiment de Google Alertes et a préféré s’investir dans d’autres outils de curation/alertes comme la plateforme Keen, Discover (sa page d’accueil de recommandation de contenu pour mobile) ou encore la possibilité de suivre des sites directement depuis Google Chrome avec un bouton dédié. Pour autant, comme nous avions pu le constater dans l’article « Google Keen et Google Discover : les nouveaux Google Alertes ? » (BASES n°387 – décembre 2020), ces nouvelles solutions restent moins performantes que Google Alertes.
TALKWALKER ALERTS
Quant à Talkwalker Alerts, qui fonctionne sur le même principe, il s’agit avant tout d’un produit d’appel pour la plateforme de veille et de social media monitoring Talkwalker.
FEEDLY
Alors qu’il s’agissait d’un marché très statique et peu innovant, l’agrégateur Feedly a tout récemment choisi de s’aventurer sur ce créneau avec l’introduction de Leo Web Alerts (cf. Figure 1. Interface de Leo Web Alerts), qui n’est cependant accessible que si l’on dispose, au minimum, de la version payante Pro+ (une centaine d’euros par an) de son lecteur RSS.
Figure 1. Interface de Leo Web Alerts
L’outil fonctionne sur un corpus de plus de 2000 sources sélectionnées par des experts (donc beaucoup moins que Google Alertes, mais des sources plus qualifiées). L’utilisateur peut entrer sa requête par mot-clé, mais aussi, et c’est très intéressant, des entités (sujet, entreprise ou produit) qu’il va chercher dans son Knowledge Graph. À titre d’exemple, si l’on choisit de rechercher sur l’entité « Amazon » et pas juste le mot-clé, Leo va chercher également sur les différentes filiales d’Amazon.
L’utilisateur peut chercher sur les titres des contenus uniquement, tout le contenu, exclure certaines sources et certains sujets.
Voir notre article « Les Knowledge Graphs vont-ils enfin révolutionner la recherche d’information professionnelle ? » - BASES n°394 – juillet/août 2021
Notre avis :
Malgré tous ses défauts, Google Alertes reste un outil incontournable pour tous ceux qui ont besoin d’avoir recours à la « veille radar ». Il permettra de découvrir quelques contenus non repérés ailleurs, mais aussi de découvrir des sources intéressantes que l’on pourra ensuite inclure à ses outils de veille « ciblée ».
La nouvelle fonctionnalité de Feedly semble quant à elle très prometteuse et méritera qu’on la suive de près. Mais, à ce stade, le corpus de 2000 sources risque d’être un peu trop limité quand on cherche véritablement à sortir de son univers informationnel et découvrir de nouvelles sources. Les outils d’alertes Web sont et restent utiles, mais uniquement en complément d’autres outils et en ayant bien conscience de leurs limites (voir notre article « La question du lecteur : faut-il à tout prix automatiser sa veille ? » dans ce même numéro). Ils fonctionnaient tous sur un modèle de gratuité, mais l’arrivée de Feedly et ses Leo Web Alerts pourrait changer la donne.
Les outils de recommandations automatiques : des assistants personnels à qui il faut faire confiance avec modération
Depuis quelques années, on voit se développer des outils de recommandation automatique à base d’IA, souvent présentés comme des « assistants personnels intelligents » capables de vous fournir sur un plateau des contenus qui vous intéressent sans même que vous les ayez demandés ou du moins sans même devoir fournir beaucoup d’efforts.
Notre avis :
Finalement, ces assistants de recommandations sont un peu les nouveaux Google Alertes. Ils se positionnent complètement sur de la « veille radar » en permettant de découvrir des sources et contenus en dehors de son dispositif de veille et, de ce point de vue-là, ils sont très intéressants. Mais comme tous les outils qui mettent en avant l’usage de l’IA et qui sont des boîtes noires, attention à ne pas se fier aveuglément à ce qu’ils proposent. Rien ne garantit que ces outils intègrent bien toutes les sources dont vous avez besoin. Et quand bien même ils les auraient, rien ne garantit qu’ils feront émerger tous les contenus de ces sources susceptibles de réellement vous intéresser. Encore une fois, ces outils doivent être perçus comme des compléments à d’autres outils de veille.
Outils de veille open source : la gratuité a un prix
Comme nous avons pu le voir précédemment, la majorité des outils de veille gratuits ont en réalité basculé sur des modèles freemium même si la plupart restent malgré tout bon marché en ne dépassant pas les quelques centaines d’euros/an.
GITHUB
Notre avis :
C’est un fait, il y a de plus en plus de petits programmes et morceaux de codes permettant de faire de la veille ou d’optimiser sa veille sur des plateformes comme Github.
Mais comme il s’agit avant tout de plateformes destinées à des informaticiens et développeurs, il faut faire preuve d’une certaine volonté et ne pas avoir peur d’y passer du temps pour comprendre comment récupérer ces outils et les installer. L’idéal étant même de se faire aider par des personnes compétentes et formées au développement Web pour réussir à en tirer parti au mieux.
La majorité des outils que l’on peut trouver sur Github viendront répondre à des besoins de veille « ciblée ». Ils pourront venir remplacer les lecteurs RSS ou outils de surveillance de pages disponibles sur le Web même s’il faut bien avoir conscience que ces outils restent généralement moins perfectionnés et puissants que les outils freemiums que l’on peut trouver sur le Web.
Outils de surveillance des réseaux sociaux : avant tout des produits d’appel
Dernière catégorie d’outils : les outils de surveillance des réseaux sociaux.
La majorité des outils qui se spécialisent sur ce type de contenus sont des grosses plateformes de social media monitoring onéreuses.
Mais certains acteurs fonctionnent sur un modèle freemium avec une version gratuite très limitée aussi bien en nombre d’alertes, de résultats visualisables et de possibilités de recherche et de filtres. Dès qu’on sort de la version gratuite, les tarifs augmentent d’ailleurs très rapidement et on sort vite de la catégorie des outils de veille bon marché.
On pensera ainsi à des outils comme Mention ou Alerti qui existent depuis de nombreuses années et proposent des versions gratuites/peu chères. Mais au final, ces versions sont surtout des produits d’appels pour les versions plus onéreuses de l’outil. Ces outils se positionnent essentiellement sur la veille « radar ».
Notre avis :
Il y a un véritable besoin pour la surveillance des médias sociaux et ces plateformes qui proposent des versions gratuites ou bon marché sont alléchantes sur le papier.
Cependant, à l’usage, les limitations sont tellement grandes qu’on peut se demander si cela vaut vraiment la peine d’avoir recours à ce type d’outils quand, de toute façon, on ne pourra pas mettre plus d’une centaine d’euros dans un outil.
Mieux vaut peut-être explorer les quelques fonctionnalités de surveillance des réseaux sociaux proposés par certains lecteurs RSS, créer des flux RSS sur certains comptes ou tout simplement lancer des requêtes régulières sur ces réseaux…
Outils gratuits/freemiums et le risque de l’usine à gaz
Comme nous avons pu le voir précédemment, il existe différents types d’outils de veille gratuits/bon marché qui répondent à des besoins et usages différents.
Si on veut réussir à construire un système de veille le plus efficace et abouti possible, on se retrouve vite dans l’obligation de devoir utiliser plusieurs outils : un lecteur RSS comme élément central du système de veille sur lequel viennent ensuite se greffer un ou des outils de surveillance de pages, des outils d’alertes Web et des outils de recommandations automatiques.
Et cela peut vite faire émerger quelques contraintes :
- Comme ces outils fonctionnent de plus en plus sur un modèle freemium, combiner plusieurs outils peut vite mener à une explosion des coûts.
- Les outils gratuits ou bon marché étant par nature plus instables, il faut être prêt à réagir vite si l’un d’entre eux change de modèle économique ou disparaît du jour au lendemain.
- Comme ces outils se focalisent principalement sur la phase de collecte de la veille contrairement aux grosses plateformes de veille qui prennent en compte tout le cycle de la veille, il va encore falloir rajouter d’autres outils (soit déjà présents dans l’entreprise soit eux aussi gratuits/freemium) notamment pour la capitalisation et la diffusion de la veille.
Il faut donc faire bien attention à ce que son système de veille ne se transforme pas trop en usine à gaz, susceptible d’imploser au moindre changement d’un des éléments qui le compose.
Si on doit réaliser des veilles de grande ampleur, plusieurs veilles sur des thématiques différentes, si on a besoin de fonctionnalités avancées et que le budget dont on dispose peut aller jusqu’à quelques milliers d’euros, on pourra aussi regarder du côté des grosses plateformes de veille qui proposent de plus en plus d’offres à destination des PME/TPE et indépendants
Voir notre article : Plateformes de veille : qu’ont-elles à offrir aux PME et TPE ? – BASES n°391 – avril 2021
Le monde des outils de veille a toujours été scindé en deux grands ensembles avec les outils de veille gratuits/freemium d’un côté et les grosses plateformes onéreuses de l’autre. Mais de plus en plus, on constate qu’ils se rejoignent dans la catégorie intermédiaire : les outils freemiums, si on veut les utiliser au maximum de leurs capacités, sont nécessairement payants et nécessitent un budget intermédiaire. À l’inverse, les plateformes de veille cherchent à conquérir un nouveau public comme les TPE, PME et indépendants et proposent des versions simplifiées/bridées de leurs plateformes à des tarifs plus abordables.
On conseillera donc de ne pas exclure trop vite les plateformes de veille et de comparer outils freemiums et versions simplifiées des plateformes de veille avant de se lancer dans le choix d’un outil.